Dès le deuxième jour dans le New
York Times, l’explication
détaillée de l’événement voit le jour. (Contributions
d’experts, éditoriaux plus fournis, articles de fond sur les
conséquences des attentats, etc.)
D’abord
quelque chose arrive, éclate, déchire un ordre déjà établi ;
puis une impérieuse demande de sens se fait entendre, comme une
exigence de mise en scène (…)
35)
Les précédents conflits entre les populations musulmanes et les
Etats-Unis durant les années précédent le 11 Septembre ont souvent
donné lieu à des interprétations fondées sur des « assomptions
et inexactitudes » (assumptions and innacuracies) 36)
Selon Edward Said, professeur à l’université de Columbia à New
York, les médias américains ont « analysé caractérisé,
donné des cours [sur l’islam], basés sur des faits loins d’être
objectifs » 37)
La nation endeuillée, toutes les valeurs
américaines remises en questions, les médias se doivent d’accuser,
de pointer du doigt le responsable de cette catastrophe occidentale.
Qui mieux que les musulmans auraient pu servir de bouc émissaire ?
L’ "anti-Muslim fervor", comme le journaliste
Jodi Wilgoren l’a nommée, peut commencer. Avant
même qu’une investigation ait été lancée concernant le 11
Septembre, les medias audiovisuels, la presse aussi ont largement
supposé que les responsables de ces attaques n’étaient autres
qu’un groupe musulman fondamentaliste.
Bien que les médias aient eu raison dans leurs
hypothèses, il est légitime de se demander, comment, après ces
attaques, a été présentée la population musulmane dans le New
York Times plus particulièrement.
En France l’ennemi est présenté sous les
traits inquiétants des “nouveaux barbares” dont la violence
irrationnelle effraye: « Il s’agit
évidemment d’une logique barbare, d’un nouveau nihilisme ».
38) Au
New York Times,
la recherche du coupable devient une mission prioritaire, et les
journalistes du Times
semblent impatients de retrouver le commanditaire des attaques et de
les voir punis.
Je n’ai absolument aucun doute
que l’équipe Bush fera payer cher aux auteurs lorsqu’elle les
aura identifiés. 39)
Dès le 12 Septembre 2001, la responsabilité
se reporte au plus vite sur Oussama Ben Laden malgré le déni des
Talibans.
Lors d’une
série de déclarations jeudi soir, cette nation dirigée par des
talibans et abritant le suspect Oussama ben Laden, condamne les
attaques sur les Etats unis et déclare que son célèbre invite
n’est pas impliqué.
40)
Ainsi l’assimilation terroriste/musulman est rapidement effectuée
par les mass médias américains.
En comparaison, une nette amélioration depuis la deuxième guerre
mondiale et le racisme anti-japonais qui s’y manifesta est
constatée. Une pointe de subjectivité reste, mais l’hystérie
anti-japonaise appartient au passé 41).
En 1943, les Japonais Américains de la
côte Ouest furent placés dans des camps à travers le pays, la
majorité des Américains craignant que ces Japonais ne montrent plus
de loyauté envers leur pays d’origine qu’envers les Etats-Unis.
C’étaient bien les médias qui
furent responsables de ce sentiment envers les Japonais américains,
en les attaquant dans plusieurs articles, tout comme le Général J.L
DeWitt de l’armée américaine les qualifiant de « groupe non
assimilé, très soudé entre eux, lié à une nation ennemie aux
loyautés inconnues » 42) Au
moment où la coalition envahissait l’Irak, l’historien Arthur
Schlesinger analyse la stratégie du président Bush, la comparant à
celle de Roosevelt lors de Pearl Harbor :
[…]
terriblement proche de la politique menée par le Japon impérial au
moment de Pearl Harbor. Un jour qui, comme l’avait annoncé à
l’époque un autre président américain, était resté "à
jamais marqué du sceau d’infamie"
43)
La couverture de l’après 11 septembre a consacré son attention à
exposer la menace d’Oussama ben Laden et des forces d’Al Qaida.
Selon une étude du Département d’Etat en Avril 2002, « les
incidents tels que le harcèlement verbal, les agressions physiques,
et les regards menacants, ont triplé après le 11 Septembre » :
44)
Environ
75% des américains musulmans connaissent quelqu’un qui a connu la
discrimination ou ont eux même été victimes d’actes racistes, de
harcèlement, d’abus verbal, ou d’attaques physiques depuis le 11
Septembre. Le sondage des musulmans américains effectué par le
Collège Hamilton et Zogby International, démontre que Presque un
tiers des musulmans pensent que les interrogatoires et les
arrestations de musulmans par le FBI aux Etats-Unis après le 11
Septembre, sont des abus injustifiés des libertés civiles45)
En
1998, MacDonald et Petherman affirmaient déjà:
Inexactitude,
mensonges, déformation, préjugé, propagande, sensationnalisme,
banalisation, faute de goût, vulgarité, sexisme, racisme, bavure,
atteinte à la vie privée, sont tant de façons dont les
journalistes se servent pour offenser les membres de la société
sans rompre aucune norme médiatique 46).
La même année, Greta D.Little remarque la
tendance des médias à accuser les musulmans d’actes terroristes.
Les attentats de 1995 à Oklahoma City en sont un exemple frappant.
La
première hypothèse était que les responsables étaient les
terroristes arabes. Même lorsqu’il était devenu clair que les
terroristes étaient nés aux Etats-Unis, la suspicion n’était pas
dissipée 47)
L’analyse des gros titres du New
York Times de Septembre 2001 à Juin
2002 souligne la perception que le journal a de l’Islam et du
terrorisme.
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