jeudi 12 septembre 2013

c) Punir le mal oui, mais avec prudence.

Suite aux déclarations officielles, les médias occidentaux n'ont pas tardé (sans preuves à l'appui) à approuver le déclenchement d'actions punitives contre des cibles civiles au Moyen-Orient et en Asie centrale. Le NYT lui-même, directement concerné, et à fleur de peau laisse place à son envie de vengeance. Le journaliste William Saffire exprime librement sa haine :
Lorsque nous aurons raisonnablement pu déterminer la localisation des bases et des camps de nos attaquants, nous devrons les pulvériser- en minimisant mais également en acceptant les risques de dommages collatéraux. Nous devrons agir par des opérations [militaires] directes mais également par des actions en sous-main [de nos services de renseignement], afin de déstabiliser les États hôtes de la terreur 29)
Le 14 Septembre, on pouvait lire aussi un radical « Join us, or face destruction. »(Rejoignez nous ou vous serez détruit). La politique générale du New York Times n’est pourtant pas l’acceptation d’une telle violence. Il existe un contrepoids au sein même de la rédaction. La tendance est aussi à la prudence:

Ce que nous ressentons maintenant, c'est un besoin de représailles. Mais nous vivons dans un age où même la revanche est compliquée. [...] Nous sommes confrontés à un acte de guerre, sans nation ennemie contre laquelle se battre. Cette même télévision qui nous a transmis les images du World Trade Center en train de s'effondrer nous montre des civils vivant dans les pays mêmes qui hébergent, peut-être, les terroristes; des civils dont la vie est juste aussi ordinaire et précieuse que celles que nous avons perdues. Le président Bush et le Congrès doivent soupeser avec soin le besoin d'accroître la sécurité et la nécessité de protéger les droits constitutionnels du public. La nation doit se préparer avec sérénité et détermination à entrer dans la première guerre du nouveau siècle, une guerre qui va commencer avec l'identification et le châtiment des auteurs des meurtres massifs d'hier et qui doit se poursuivre jusqu'à ce que les soutiens des terroristes soient éliminés [...] Le terrible message du 11 septembre est que l'engagement de la nation (contre le terrorisme anti-américain) a été insuffisant. 30)

La mise en garde contre une future guerre contre le terrorisme est ainsi faite. La réaction du gouvernement semble même redoutée.
L’éditorial de ce 12 septembre souligne la valeur de ces vies humaines « aussi ordinaires et précieuses » que celles des citoyens américains morts dans les attaques. Beaucoup de recul est pris, et certains journalistes du NYT ne sombrent pas dans une haine inconsidérée. Au Washington Post, la rédaction prévoit plutôt « une guerre du nouveau siècle », une sorte de troisième guerre mondiale, qui devra punir les auteurs de ce drame.
Les journaux Américains abritent ainsi deux tendances qui s’opposent : l’envie de vengeance, et l’appel à la prudence. Le NYT ne semble pas choisir entre les deux convictions soutenues au sein même de sa rédaction. La presse garde en vue ce qui est l’une de ses missions : l’organisation de la confrontation des points de vue sans laquelle il n’est de véritable démocratie.
A l’étranger, la presse de leurs « alliés », la Grande Bretagne et Israël, semble aussi opposée sur l’attitude adéquate pour réagir à cet événement :

Les Etats-Unis doivent se garder de sur réagir militairement. Il est tentant de trouver quelqu'un pour le faire payer encore et encore... Que l'Amérique respire un bon coup. Keep cool ! 32)

Les spectacles horribles de New York et de Washington vont ouvrir les yeux du plus grand nombre. [...] Nous, les Israéliens, nous pouvons leur rappeler avec tristesse: nous vous l'avions bien dit. [...] Le terrorisme est le nazisme de notre époque. Et de la même façon qu'il était inenvisageable de négocier avec les nazis pendant la Seconde Guerre mondiale, il est hors de question aujourd'hui d'engager la moindre négociation diplomatique avec des terroristes en ce début de siècle. 33)

La une du 12 Septembre est pourtant claire et aucune négociation ne semble prévue: “a somber Bush” déclare la guerre contre le terrorisme.
« Terrorism cannot prevail » ; « Punishment for evil » 34). La présidence américaine est apparemment déterminée à entrer dans une phase punitive.
Pour ou contre une réaction excessive : quoi que le New York Times en dise, George W. Bush a décidé de combattre le terrorisme, sans demander son avis à la presse, ni même à la population. C’est alors que la presse, tous les médias, se donnent comme mission la recherche du ou des coupables, ceux qui ont brisé le rêve américain. Une quête de la vérité, ou d’une vérité commence. Qui a tué l’Amérique ?


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