Suite aux déclarations officielles, les médias occidentaux n'ont
pas tardé (sans preuves à l'appui) à approuver le déclenchement
d'actions punitives contre des cibles civiles au Moyen-Orient et en
Asie centrale. Le NYT lui-même, directement concerné, et à
fleur de peau laisse place à son envie de vengeance. Le journaliste
William Saffire exprime librement sa haine :
Lorsque nous aurons raisonnablement pu déterminer la localisation
des bases et des camps de nos attaquants, nous devrons les
pulvériser- en minimisant mais également en acceptant les risques
de dommages collatéraux. Nous devrons agir par des opérations
[militaires] directes mais également par des actions en sous-main
[de nos services de renseignement], afin de déstabiliser les États
hôtes de la terreur 29).
Le 14 Septembre, on pouvait lire aussi un
radical « Join us, or face destruction. »(Rejoignez nous
ou vous serez détruit). La politique générale du New
York Times n’est pourtant pas l’acceptation d’une telle
violence. Il existe un contrepoids au sein même de la rédaction. La
tendance est aussi à la prudence:
Ce que nous ressentons
maintenant, c'est un besoin de représailles. Mais nous vivons dans
un age où même la revanche est compliquée. [...] Nous sommes
confrontés à un acte de guerre, sans nation ennemie contre laquelle
se battre. Cette même télévision qui nous a transmis les images du
World Trade Center en train de s'effondrer nous montre des civils
vivant dans les pays mêmes qui hébergent, peut-être, les
terroristes; des civils dont la vie est juste aussi ordinaire et
précieuse que celles que nous avons perdues.
Le président Bush
et le Congrès doivent soupeser avec soin le besoin d'accroître la
sécurité et la nécessité de protéger les droits constitutionnels
du public. La nation doit se préparer avec sérénité et
détermination à entrer dans la première guerre du nouveau siècle,
une guerre qui va commencer avec l'identification et le châtiment
des auteurs des meurtres massifs d'hier et qui doit se poursuivre
jusqu'à ce que les soutiens des terroristes soient éliminés [...]
Le terrible message du 11 septembre est que l'engagement de la nation
(contre le terrorisme anti-américain) a été insuffisant.
30)
La mise en garde contre une future guerre contre le terrorisme est
ainsi faite. La réaction du gouvernement semble même redoutée.
L’éditorial de ce 12 septembre souligne la valeur de ces vies
humaines « aussi ordinaires et précieuses » que celles
des citoyens américains morts dans les attaques. Beaucoup de recul
est pris, et certains journalistes du NYT ne sombrent pas dans
une haine inconsidérée. Au Washington Post, la rédaction
prévoit plutôt « une guerre du nouveau siècle », une
sorte de troisième guerre mondiale, qui devra punir les auteurs de
ce drame.
Les journaux Américains abritent ainsi deux tendances qui
s’opposent : l’envie de vengeance, et l’appel à la
prudence. Le NYT ne semble pas choisir entre les deux
convictions soutenues au sein même de sa rédaction. La
presse garde en vue ce qui est l’une de ses missions :
l’organisation de la confrontation des points de vue sans laquelle
il n’est de véritable démocratie.
A l’étranger, la presse de leurs « alliés », la
Grande Bretagne et Israël, semble aussi opposée sur l’attitude
adéquate pour réagir à cet événement :
Les Etats-Unis doivent se garder
de sur réagir militairement. Il est tentant de trouver quelqu'un
pour le faire payer encore et encore... Que l'Amérique respire un
bon coup. Keep cool !
32)
Les spectacles horribles de New
York et de Washington vont ouvrir les yeux du plus grand nombre.
[...] Nous, les Israéliens, nous pouvons leur rappeler avec
tristesse: nous vous l'avions bien dit. [...] Le terrorisme est le
nazisme de notre époque. Et de la même façon qu'il était
inenvisageable de négocier avec les nazis pendant la Seconde Guerre
mondiale, il est hors de question aujourd'hui d'engager la moindre
négociation diplomatique avec des terroristes en ce début de
siècle. 33)
La une du 12 Septembre est pourtant claire et aucune négociation ne
semble prévue: “a somber Bush” déclare la guerre contre le
terrorisme.
« Terrorism cannot prevail » ;
« Punishment for evil » 34).
La présidence américaine est apparemment déterminée à
entrer dans une phase punitive.
Pour ou contre une réaction excessive : quoi que le New York
Times en dise, George W. Bush a décidé de combattre le
terrorisme, sans demander son avis à la presse, ni même à la
population. C’est alors que la presse, tous les médias, se donnent
comme mission la recherche du ou des coupables, ceux qui ont brisé
le rêve américain. Une quête de la vérité, ou d’une vérité
commence. Qui a tué l’Amérique ?
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